Rien ne prédisposait au départ cette petite maison, situé au bord de l’eau, à côté d’un chantier ostréicole, à devenir une rénovation exemplaire pouvant rivaliser avec des maisons neuves à énergie positive. Constituée d’une base en pierres enduites au mortier de ciment, complétée au fil du temps par des appentis bricolés et couverts en tôles ou fibrociment, le tout sans intérêt architectural, elle faisait triste mine au départ. Néanmoins, c’était sans compter sur la ferme volonté de son acquéreur, « en l’état », fraîchement retraité, et bien décidé à la transformer en bête de course à la maîtrise de l’énergie et à montrer à un monde incrédule que, même dans le domaine du bâtiment, on peut faire des merveilles avec du vieux. Bien sûr, quand Olivier est venu me trouver en 2012 pour l’accompagner sur son projet, j’ai tout de suite relevé le défi !
Beaucoup de difficultés à gérer pourtant !
Sur le plan administratif d’abord, car, malgré le regard favorable et bienveillant de la mairie sur le projet, nous avons rencontré une incompréhensible, mais violente, opposition de l’administration en charge de l’instruction du dossier. La DDTM et le CAUE (consulté à la demande de la DDTM), confortés ensuite par la Préfecture, ont mis tout leur poids pour faire capoter ce projet pourtant tellement conforme aux discours entendus, en haut lieu, sur la transition énergétique et la nécessité de rendre vertueux, sur le plan de la dépense d’énergie, le parc immobilier existant. Même la fiche de « projet exemplaire », établie en amont par l’agence locale de l’énergie (ALOEN) et validée par l’ADEME, ainsi que l’intervention d’un Sénateur, n’avait pas réussie à convaincre des gens campant sur leurs vieilles idées et conceptions, accrochés à une lecture rigide des règles d’urbanisme*1.
Pour faire aboutir ce projet, au bout de 4 versions, à chaque fois mal perçues par les services instructeurs, il aura fallu le courage du maire qui, fermement décidé à soutenir un projet qu’il qualifia de bon sens, signa finalement l’autorisation de travaux (17/10/2013). Las ! La préfecture déposa un recours auprès du Tribunal Administratif (20/12/2013) et il fallut encore batailler avec l’appui d’un avocat spécialiste du droit de l’urbanisme, pour que le bon sens triomphe (26/06/2014), enfin, après près de trois années perdues ! Pendant tout ce temps, Olivier habite à côté dans un petit mobil home.
Parallèlement, la conception a dû faire face à la gestion de nombreuses difficultés techniques qui se présentaient comme de véritables challenges : à commencer par l’avantage qui est aussi un gros inconvénient : celui d’avoir « les pieds dans l’eau ». Avantage d’une vue magnifique et dégagée sur la RIA d’Etel, en plein sud, mais inconvénient d’avoir de gros soucis d’humidité et des risques importants de montée des eaux dans la hauteur du soubassement. Il a fallu « cogiter » beaucoup pour que les bonnes solutions apparaissent, surtout qu’il était impératif qu’elles soient efficaces mais aussi écologiques : donc murs perspirants (enduits au ciment supprimés), un vide sanitaire (pr-existant) ventilé par dépression naturelle grâce à l’utilisation d’un conduit de cheminée (heureusement, les murs en pierres descendaient à environ un mètre sous le niveau du sol du rez de chaussée), un pompage occasionnel automatique, car le niveau d’eau peut monter parfois rapidement dans le vide sanitaire, suite aux intempéries ou à une grande marée, quand ce n’est pas les deux en même temps. Pour le reste, nous ne serons pas plus dans des solutions conventionnelles : isolation par l’extérieur à l’aide d’un complexe thermopierre de 25 cm + liège, menuiseries équipées de triple vitrages + stores intégrés derrière une 4ème vitre (Internorm), étanchéité à l’air très soignée, création d’une grande baie au sud pour bénéficier d’apports solaires*2, ventilation double flux à haut rendement et centrale photovoltaïque 4 kWc permettant de couvrir les consommations d’électricité, tous usages confondus (éclairage, électroménager, chauffage d’appoint, production d’eau chaude sanitaire, etc…). Au final, d’après les relevés de production et de consommation sur la première année de fonctionnement, nous avons environ 4000 kW/h produits et 2800 kW/h consommés. Nous sommes donc bien dans le cadre d’un bâtiment à énergie positive. Sans doute la toute première maison existante rénovée « BEPOS » en Bretagne, et peut être même en France. Les besoins de chauffage payant sont bien sûr extrêmement réduits pour un bâtiment existant rénové : de l’ordre de 1200 kW/h/an (surface habitable = 100m²). Ils sont couverts grâce aux apports solaires passifs (gratuits), aidés par une très grosse inertie, et, pour le moment par un appoint de chauffage électrique fonctionnant très occasionnellement en fin de nuit. Néanmoins, le maître d’ouvrage envisage d’installer une petite cuisinière à bois (il faudra en trouver une très petite pour ne pas surchauffer la maison). Bien sûr, toutes les solutions techniques et les matériaux utilisés ont été choisis de manière à être le plus écologique possible. On retrouvera donc, en plus des murs majoritairement en pierres conservés, et les toitures, toutes refaites en ardoises naturelles, des matériaux tels que le liège (toute l’isolation a été réalisée grâce à des panneaux et des granulés de liège), le bois (majoritairement douglas chêne), le fermacell, la chaux (enduits), sans oublier les peintures minérales pour les finitions.
Au final, une de mes plus belles aventures professionnelles et, après l’avoir accompagné avec passion, durant trois années pleines de rebondissements, je ne peux que souhaiter à Olivier de passer tranquillement une excellente retraite dans sa petite « maison de pêcheur éco-passive » bien méritée.
*1 - Le POS de l’époque stipulait que l’on ne pouvait pas augmenter l’emprise des bâtiments existants dans la bande des 100m situés à partir du rivage. Cela avait été fait avec bon sens pour empêcher la construction anarchique en bord de mer. Néanmoins, cela n’avait jamais été, comme l’avait bien compris la mairie, pour empêcher d’isoler une maison par l’extérieur. Les services instructeurs auraient donc dû déroger !!!
*2 - La baie située au sud, et permettant de bénéficier d’apports solaires (chauffage gratuit) devait être plus grande en englobant la porte. Mais cela ne plaisait pas à l’architecte du CAUE et elle a donc été réduite d’un mètre dans la dernière version du projet.











Rien ne prédisposait au départ cette petite maison, situé au bord de l’eau, à côté d’un chantier ostréicole, à devenir une rénovation exemplaire pouvant rivaliser avec des maisons neuves à énergie positive. Constituée d’une base en pierres enduites au mortier de ciment, complétée au fil du temps par des appentis bricolés et couverts en tôles ou fibrociment, le tout sans intérêt architectural, elle faisait triste mine au départ. Néanmoins, c’était sans compter sur la ferme volonté de son acquéreur, « en l’état », fraîchement retraité, et bien décidé à la transformer en bête de course à la maîtrise de l’énergie et à montrer à un monde incrédule que, même dans le domaine du bâtiment, on peut faire des merveilles avec du vieux. Bien sûr, quand Olivier est venu me trouver en 2012 pour l’accompagner sur son projet, j’ai tout de suite relevé le défi !
Beaucoup de difficultés à gérer pourtant !
Sur le plan administratif d’abord, car, malgré le regard favorable et bienveillant de la mairie sur le projet, nous avons rencontré une incompréhensible, mais violente, opposition de l’administration en charge de l’instruction du dossier. La DDTM et le CAUE (consulté à la demande de la DDTM), confortés ensuite par la Préfecture, ont mis tout leur poids pour faire capoter ce projet pourtant tellement conforme aux discours entendus, en haut lieu, sur la transition énergétique et la nécessité de rendre vertueux, sur le plan de la dépense d’énergie, le parc immobilier existant. Même la fiche de « projet exemplaire », établie en amont par l’agence locale de l’énergie (ALOEN) et validée par l’ADEME, ainsi que l’intervention d’un Sénateur, n’avait pas réussie à convaincre des gens campant sur leurs vieilles idées et conceptions, accrochés à une lecture rigide des règles d’urbanisme*1.
Pour faire aboutir ce projet, au bout de 4 versions, à chaque fois mal perçues par les services instructeurs, il aura fallu le courage du maire qui, fermement décidé à soutenir un projet qu’il qualifia de bon sens, signa finalement l’autorisation de travaux (17/10/2013). Las ! La préfecture déposa un recours auprès du Tribunal Administratif (20/12/2013) et il fallut encore batailler avec l’appui d’un avocat spécialiste du droit de l’urbanisme, pour que le bon sens triomphe (26/06/2014), enfin, après près de trois années perdues ! Pendant tout ce temps, Olivier habite à côté dans un petit mobil home.
Parallèlement, la conception a dû faire face à la gestion de nombreuses difficultés techniques qui se présentaient comme de véritables challenges : à commencer par l’avantage qui est aussi un gros inconvénient : celui d’avoir « les pieds dans l’eau ». Avantage d’une vue magnifique et dégagée sur la RIA d’Etel, en plein sud, mais inconvénient d’avoir de gros soucis d’humidité et des risques importants de montée des eaux dans la hauteur du soubassement. Il a fallu « cogiter » beaucoup pour que les bonnes solutions apparaissent, surtout qu’il était impératif qu’elles soient efficaces mais aussi écologiques : donc murs perspirants (enduits au ciment supprimés), un vide sanitaire (pr-existant) ventilé par dépression naturelle grâce à l’utilisation d’un conduit de cheminée (heureusement, les murs en pierres descendaient à environ un mètre sous le niveau du sol du rez de chaussée), un pompage occasionnel automatique, car le niveau d’eau peut monter parfois rapidement dans le vide sanitaire, suite aux intempéries ou à une grande marée, quand ce n’est pas les deux en même temps. Pour le reste, nous ne serons pas plus dans des solutions conventionnelles : isolation par l’extérieur à l’aide d’un complexe thermopierre de 25 cm + liège, menuiseries équipées de triple vitrages + stores intégrés derrière une 4ème vitre (Internorm), étanchéité à l’air très soignée, création d’une grande baie au sud pour bénéficier d’apports solaires*2, ventilation double flux à haut rendement et centrale photovoltaïque 4 kWc permettant de couvrir les consommations d’électricité, tous usages confondus (éclairage, électroménager, chauffage d’appoint, production d’eau chaude sanitaire, etc…). Au final, d’après les relevés de production et de consommation sur la première année de fonctionnement, nous avons environ 4000 kW/h produits et 2800 kW/h consommés. Nous sommes donc bien dans le cadre d’un bâtiment à énergie positive. Sans doute la toute première maison existante rénovée « BEPOS » en Bretagne, et peut être même en France. Les besoins de chauffage payant sont bien sûr extrêmement réduits pour un bâtiment existant rénové : de l’ordre de 1200 kW/h/an (surface habitable = 100m²). Ils sont couverts grâce aux apports solaires passifs (gratuits), aidés par une très grosse inertie, et, pour le moment par un appoint de chauffage électrique fonctionnant très occasionnellement en fin de nuit. Néanmoins, le maître d’ouvrage envisage d’installer une petite cuisinière à bois (il faudra en trouver une très petite pour ne pas surchauffer la maison). Bien sûr, toutes les solutions techniques et les matériaux utilisés ont été choisis de manière à être le plus écologique possible. On retrouvera donc, en plus des murs majoritairement en pierres conservés, et les toitures, toutes refaites en ardoises naturelles, des matériaux tels que le liège (toute l’isolation a été réalisée grâce à des panneaux et des granulés de liège), le bois (majoritairement douglas chêne), le fermacell, la chaux (enduits), sans oublier les peintures minérales pour les finitions.
Au final, une de mes plus belles aventures professionnelles et, après l’avoir accompagné avec passion, durant trois années pleines de rebondissements, je ne peux que souhaiter à Olivier de passer tranquillement une excellente retraite dans sa petite « maison de pêcheur éco-passive » bien méritée.
*1 - Le POS de l’époque stipulait que l’on ne pouvait pas augmenter l’emprise des bâtiments existants dans la bande des 100m situés à partir du rivage. Cela avait été fait avec bon sens pour empêcher la construction anarchique en bord de mer. Néanmoins, cela n’avait jamais été, comme l’avait bien compris la mairie, pour empêcher d’isoler une maison par l’extérieur. Les services instructeurs auraient donc dû déroger !!!
*2 - La baie située au sud, et permettant de bénéficier d’apports solaires (chauffage gratuit) devait être plus grande en englobant la porte. Mais cela ne plaisait pas à l’architecte du CAUE et elle a donc été réduite d’un mètre dans la dernière version du projet.










